L’enfance et l’adolescence
Ernestine Brière était la fille d’Henri Brière et Louise-Anna Martel, de Marieville. Huitième enfant de la famille, elle voit le jour le 6 septembre 1889 et est baptisée le lendemain dans l’église paroissiale en présence de son père ainsi que ses parrain et marraine, Omer Martel, son oncle, et Alphonsine Alix, épouse du parrain.
La maison familiale située dans le rang de la Branche du Pin Rouge abrite le nouveau poupon accueilli par ses trois frères (Florida, Arthur et Eugène) et quatre sœurs (Elphégina, Rosetta, Alberta et Marie-Rose) dont l’âge varie entre 13 ans et 17 mois. À quelques jours de son troisième anniversaire de naissance, soit le 2 septembre 1892, naîtra une petite sœur qu’on prénommera Marie-Louise. La famille est ainsi complète.
Des moments difficiles marquent la vie familiale. À 3 ½ ans, la petite Ernestine connaît la douleur de perdre sa sœur Alberta décédée prématurément à l’âge de 9 ans, le 22 juin 1893. Elle n’a pas dix ans lorsque sa famille déménage aux États-Unis. La situation économique difficile à cette époque incite plusieurs canadiens à émigrer chez nos voisins du sud dans l’espoir d’y trouver de meilleures conditions de vie.
De retour au Québec avec les siens quelques années plus tard, elle poursuit ses études au Couvent de la Présentation de Marie de Marieville. Puis, elle voit plusieurs de ses frères et sœurs fonder une famille, certains s’établissant aux États-Unis d’autres au Québec. Pour elle, le mariage ne semble pas la voie répondant à ses aspirations; l’appel de la vie religieuse se fait plutôt sentir.
La vie religieuse
Deux jours après avoir célébré son 18e anniversaire de naissance, soit le 8 septembre 1907, Ernestine quitte le foyer familial pour enter au couvent. Un grand vide se crée dans l’humble habitation des Brière dans le village de Marieville puisque sa sœur Marie-Rose décide de l’accompagner dans cette vocation. On imagine que la fierté se manifeste en alternance avec la tristesse chez les parents qui acceptent cette importante décision de leurs enfants. Elles joignent les rangs de la communauté religieuse des Soeurs de la Présentation de Marie, à Saint-Hyacinthe, où le noviciat les attend.
Les soeurs Brière font profession religieuse le 6 août 1910. Ernestine devient Soeur Marie-Imelda alors que Marie-Rose sera dorénavant connue comme Soeur Maria-de-Lourdes. Une longue vie de prière et de devoir les attend. Elles demeureront toujours l’une pour l’autre un précieux soutien moral.
L’âme, le cœur et la tête
Soeur Marie-Imelda reçoit une obédience pour l’école de Weedon. Une classe mixte de 48 élèves l’attend. Tout le jour, sans arrêt, elle se donne à ces petits, tout réceptifs.
Une épreuve de santé l’amène à l’infirmerie en 1917. Après une année de repos, elle va essayer ses forces à Aldenville, États-Unis. Le recensement de la population américaine effectué le 3 janvier 1920 fait état de sa présence au couvent de Chicopee, au Massachussets; elle est alors âgée de 30 ans et est enseignante avec sa sœur Marie-Rose.
Elle revient à Farnham en août 1922. Là encore, une cinquantaine d’enfants, à l’Externat, bénéficient de son savoir-faire pédagogique.
En 1929, elle est appelée à l’Externat de Marieville. Son ascendant sur les élèves incite les autorités à lui confier une fonction nouvelle, celle de Maîtresse de discipline, au Pensionnat de cette localité.
De 1930 à 1943, elle s’acquitte avec sagesse de cette tâche habituellement réputée onéreuse. Femme de devoir, ordonnée, régulière, d’une dignité et d’une politesse qui ne se démentaient pas, ferme dans ses décisions, elle est une éducatrice qui sait habilement employer l’humour, la douceur, le sourire, la pénétration du regard pour entraîner sa troupe à l’acceptation de l’ordre établi. Pour les enseignantes, elle est une aide compréhensive. Grâce à son constant dévouement, chacune fait en paix sa retraite mensuelle et bénéficie de quelque répit aux jours de congé. Qui mieux que Sœur Marie-Imelda sait profiter de toute occasion pour former la jeunesse aux bonnes manières, à la tenue impeccable, à la vertu qui assure la rectitude extérieure et intérieure.
À Frelighsburg, on lui confie la discipline des garçons pensionnaires; elle assume avec un plein succès cette fonction redoutée par beaucoup d’autres. Elle conquiert ces jeunes « par le cœur », par la confiance qu’elle leur manifeste. Pour ne pas faire de peine à « leur sœur », ils se dépassent d’une façon remarquable et reçoivent des félicitations qui les rendent fiers. Aux jeux bruyants succèdent des temps d’apaisement car Sœur Marie-Imelda est une bonne narratrice. On l’écoute avec un intérêt à nul autre pareil; elle sait enrichir ses récits de bonnes leçons de morale acceptées tout naturellement. Dans ce milieu, cette femme de zèle connaît de grandes consolations apostoliques : conscientiser ces jeunes à la valeur des sacrements pour les aider à réformer leur conduite lui est un élément qui porte des fruits durables en leur éducation.
Une autre étape de sa vie commence avec la responsabilité du directorat, pendant douze ans, d’abord aux Pensionnats de Frelighsburg, puis à ceux de Saint-ours et de Saint-Hugues. Pour Sœur Marie-Imelda, c’est un long temps d’épreuve car elle ne se sent pas équipée pour porter ce fardeau qu’elle accepte toutefois, en toute soumission. Pauvre, austère, renoncée, intransigeante devant ce qui lui parait le devoir, elle a de ces exigences qui effarouchent certaines natures. Il lui est pénible d’équilibrer ses attentes de façons diverses. Malgré ses incertitudes, elle demeure fidèle à sa conscience et supporte ces heures crucifiantes mais sa santé en est affectée au point qu’elle doit rentrer à l’infirmerie en août 1955.
Le repos
Une année complète de repos précède son passage à la Maison provinciale qu’elle ne quittera plus, sauf en 1966, pour une année de soins à l’infirmerie. Elle y est d’ailleurs confinée définitivement en 1975. Trop tôt à son gré est venu l’âge de la retraite. Sa haute tension artérielle lui interdit des travaux qu’elle aurait volontiers entrepris.
Bien limitée physiquement, elle comprend alors qu’un temps privilégié est offert à son cœur apostolique pour s’adonner à la vie intérieure et au recueillement. « Comment peut-on s’ennuyer quand on a le Seigneur pour compagnon», dit-elle. Pendant ses premières années à la Maison provinciale, elle a eu la consolation de tenir fréquemment compagnie à Soeur Maria-de-Lourdes. La soutenir dans sa souffrance, l’aider à prier étaient des gestes quotidiens accomplis dans la foi et une grande amitié fraternelle.
À la communauté locale comme à l’infirmerie, Soeur Ernestine s’avère un attachant vis-à-vis à la table commune, tant qu’elle peut s’y rendre. Le sourire est acclimaté sur ses lèvres et l’attention à l’autre, une habitude qui la distingue. Elle savait bénir Dieu pour tout ce qui vient de sa main, joies ou épreuves. Tout lui devient occasion d’offrandes en vue des intentions qu’on lui a recommandées.
À l’infirmerie, cette femme apostolique apprécie beaucoup la visite des étudiantes du Collège qui désirent prendre contact avec les malades. Quelle chaleur d’accueil! Il faut voir le feu de son regard, impressionnant pour ces jeunes qui découvrent la dimension d’une vie d’amour et la beauté d’une acceptation sereine de la volonté de Dieu, au milieu de la souffrance.
Soeur Jeanne Picher, Supérieure provinciale de la communauté, mentionne que, de tout temps, Sœur Marie-Imelda a eut le culte de l’autorité : respectueuse affection, obéissance délicate et généreuse, fidélité et ferveur dans sa collaboration priante, telles en étaient les manifestations quotidiennes.
Pour ses infirmières, elle est toute reconnaissante, peu exigeante. Sa délicatesse se révèle notamment par son souci de ne pas déranger et de souffrir en silence. « Je l’avais en vénération » dira l’une des Sœurs qui fut à même de constater de quels gestes de vertu étaient constituées ses journées.
Soeur Marie-Imelda attend ainsi, paisiblement, l’appel suprême du Seigneur.
Les derniers moments et le départ
Dans la matinée du Jour de l’an de 1982, Soeur Ernestine échange avec ses sœurs les traditionnels souhaits de bonne année. Elle longe même le corridor de l’étage pour fraterniser avec chacune. Elle assiste à la célébration eucharistique, sollicitant avec ferveur, selon son habitude, mille bénédictions pour tous ceux qui lui sont chers, et ils sont légion. L’après-midi, même souffrante, elle accueille d’un bon sourire les visiteuses qui vont lui présenter leurs vœux.
Un peu avant cinq heures, elle tente de se lever mais ses genoux fléchissent. Elle réclame du secours. Son cœur flanche, presque tout de suite. À 92 ans, après 74 ans de vie religieuse au service de Dieu et de la communauté, c’est le retour à son Grand Amour !
Son corps est inhumé dans le cimetière de la communauté religieuse des Sœurs de la Présentation de Marie, à St-Hyacinthe. Son souvenir demeure dans les cœurs de ceux qui l’ont connue.