L’enfance et l’adolescence
Marie-Rose Brière était la fille d’Henri Brière et de Louise-Anna Martel, de Marieville. Elle voit le jour le 8 avril 1887 et est baptisée le lendemain dans l’église paroissiale de cette petite municipalité située sur la rive sud de Montréal. L’évènement religieuse a lieu en présence de son père ainsi que ses parrain et marraine, Olivier Martel et Célina Boulais.
Septième enfant de la famille, trois frères (Florida, Arthur et Eugène) et trois sœurs (Elphégina, Rosetta et Alberta) l’ont précédée dans le berceau familial. Deux petites sœurs viendront compléter la famille, soit Ernestine et Marie-Louise, la cadette. Les années passent dans cette famille de cultivateurs du rang de la Branche du Pin Rouge. Le 22 juin 1893, les Brière connaissent la douleur de perdre prématurément leur petite Alberta âgée de 9 ans. Les joies et les peines se succèdent pour cette famille terrienne jusqu’à ce que des difficultés financières les dirigent vers les États-Unis où la survie semble plus facile. Après quelques années chez nos voisins du sud, une partie des enfants accompagnent les parents dans leur retour au village d’origine de la famille; c’est le cas de Marie-Rose qui revient dans son village natal de Marieville.
Marie-Rose voit sa sœur Elphégina prendre époux et s’établir aux États-Unis. Plus tard, Florida et Rosetta feront de même. Arthur et Marie-Louise se marieront aussi et s’établiront au Canada alors qu’Eugène demeurera célibataire.
La vocation
C’est à l’âge de 20 ans que Marie-Rose prend une décision qui orientera le reste de sa vie. Le 8 septembre 1907, elle entre au noviciat de la communauté religieuse des Sœurs de la Présentation de Marie, à Saint-Hyacinthe, en compagnie de sa sœur Ernestine. La famille Brière voit partir le même jour deux de ses filles offertes au Seigneur, sujet de fierté qui a du créer un grand vide dans l’humble demeure de ces marievillois de grande foi.
Le monde souriait pourtant à cette jolie jeune fille au caractère doux et joyeux. Un prétendant serait même venu la visiter au couvent, tentant en vain de la faire changer d’avis quant à son avenir. Marie-Rose est convaincue, elle préfère confier la garde de son cœur à l’amour de la Vierge Marie.
Ayant fait profession religieuse le 6 août 1910, on l’a connaîtra dorénavant sous le nom de Sœur Maria-de-Lourdes.
La foi, le talent et le sourire
Le 6 août 1910, la jeune professe se voit assigner Sweetsburg comme lieu de résidence et Cowansville comme champ d’apostolat. Sa préparation antérieure la destine à l’enseignement de l’anglais car elle a fréquenté les écoles des États-Unis et s’est familiarisée à l’accent de cette langue seconde qu’elle parle couramment.
Douée des aptitudes qui assurent le succès à un professeur, pleine d’ardeur et de vie, elle acquiert très vite une expérience qui la rend capable d’assumer la responsabilité de classes surpeuplées, comme c’était le cas à l’époque dans les écoles tenues par la communauté en Nouvelle-Angleterre.
Dès 1918, elle passe aux États-Unis où elle enseigne dans les villes d’Aldenville, Three Rivers, Holyoke, Woonsocket, Phenix, Berlin et Concord, jusqu’en 1944. Le recensement du 3 janvier 1920 à Chicopee fait état de sa présence au couvent à titre d’enseignante, âgée de 32, de même que sa sœur Ernestine. Elle donne sa pleine mesure, particulièrement à Berlin où elle est chargée des garçons les plus avancés. Ses habitudes d’ordre et de méthode, son esprit d’initiative, son goût du beau et un tact exceptionnel, tant avec les enfants qu’avec leurs parents, contribuent à créer une atmosphère où chacun peut s’épanouir sous sa tutelle. Son sourire est son arme de conquête. Sa bonté et son dévouement sans mesure assurent à chacun la sécurité dont il a besoin pour progresser à son rythme. Elle inculque aux garçons de sa classe une fierté dans la tenue et une politesse dans les manières qui les distinguent en tant que groupe. Jamais elle n’a à sévir par des moyens exceptionnels, son autorité morale étant indiscutée.
Un jour, le père de l’un de ses élèves se présente au parloir, et, à défaut de se souvenir de son nom, il demande : « Je veux voir la Sœur qui sourit toujours… ». Sans hésitation, la portière appelle Sœur Maria-de-Lourdes.
D’anciens élèves ont maintes fois affirmé qu’ils devaient leur vocation religieuse à la profonde dévotion à la Vierge qu’elle leur avait inculquée. Parmi eux, un Oblat de Marie-Immaculée et un Frère Mariste lui écrivaient chaque année. Plusieurs évoquaient également leurs belles années d’école, ensoleillées par le sourire perpétuel de leur professeure. L’un d’eux venu lui rendre visite exprimait sa foi en l’efficacité de son intercession : « C’est sa prière qui me soutien » reconnaissait-il.
Après vingt-huit années de dévouement aux États-Unis, elle est revient au Québec et poursuit son enseignement à Frelighsburg puis à Saint-Ours.
En 1948, elle est chargée de l’économat à l’École Normale Marie-Rivier de Saint-Hyacinthe. Elle s’acquitte de cette responsabilité avec la discrétion, le savoir-faire et la politesse qui la caractérisent. Personne de bon conseil, elle sait aussi accepter l’avis des autres. Des sœurs de l’école qui ont connu l’épreuve de la maladie à l’époque se souviennent avec gratitude de ses multiples délicatesses alors qu’elles étaient confinées à l’infirmerie. D’anciennes élèves n’ont pas oublié ses bienfaits à leur endroit. Des nécessiteux furent soulagés grâce à ses charitables interventions.
On se souvient des joyeux moments passés en sa compagnie, tant dans la cour de récréation, où elle participait d’amblée aux jeux des élèves, que lors de ses visites dans sa famille, où elle démontrait sa vivacité et sa bonne humeur.
La retraite et la maladie
À 75 ans, elle quitte son poste pour entrer à la Maison provinciale de la communauté.
En novembre 1965, sa santé l’altérant de plus en plus, on juge prudent de lui offrir une chambre à l’Infirmerie Saint-Joseph. Sa solitude devient « un coin de prière » où Notre-Dame-de-Lourdes occupe la place d’honneur. Sereine, amante du silence, elle y coule des temps forts de sa vie de recueillement et de prière. La couleur « vert » égaie tout ce qui l’entoure; même le chapelet sur lequel elle prie fidèlement et inlassablement en est teinté. Cette innocente coquetterie a certainement pour elle un langage; était-ce celui de l’espérance ?
Ses maux s’aggravant, elle doit être déplacée et partage sa nouvelle chambre avec une autre malade. Pas une plainte ne s’échappe de ses lèvres concernant les désagréments découlant de ce changement à son environnement.
Malgré de très grandes souffrances, surtout pendant sa dernière année de maladie, jamais elle ne réclame un soulagement supplémentaire. Elle se montre reconnaissante des soins dont on l’entoure, les payant de bons sourires et de chapelets aux attentions de chacune. Elle apprécie le précieux soutien moral de sa sœur Ernestine, présente à ses côtés.
« Vous ne trouvez pas le temps trop long? » lui demande-t-on parfois. Silencieuse et souriante, elle élève alors son chapelet en guise de réponse. À sa sœur qui compatissait à sa souffrance, elle confie un jour « Je dis à Notre-Seigneur : Faites de moi tout ce que vous voudrez. »
Une semaine avant sa mort, alors qu’elle avait failli partir, son infirmière lui dit gentiment : « Grand-Mère, le bon Dieu a eu l’envie de te prendre… ». « Je le sais, j’étais consciente », « Tu n’es pas déçue ? », « Non ! ». Sa volonté était à ce point accordée totalement à celle de son Seigneur.
Le décès
Son heure est venue, le 3 mai 1973 à 18 heures. Une couronne de sœurs l’entouraient de leur prière recueillie et confiante. Sa Vierge recueillit le dernier soupir de sa servante. Son corps est inhumé dans le cimetière de la communauté religieuse des Sœurs de la Présentation de Marie, à Saint-Hyacinthe.
Conclusion
Enfant douce et joyeuse, adolescente responsable et respectueuse, sœur fidèle et attachante, femme de conviction et de devoir, Marie-Rose Brière a marqué la vie de ceux qui l’ont cotoyée et son souvenir demeure présent en chacun.
Le commentaire suivant formulé à son égard s’avère une description explicite : « Un sourire lumineux et perpétuel conférait à sa physionomie une indéfinissable attirance. »
La vie de Marie-Rose Brière, comme celle de Sœur Maria-de-Lourdes, a été marquée par l’amour, la foi, la générosité, le dévouement et un éternel sourire.
Après 86 ans d’une vie bien remplie et 66 ans de vie religieuse intense, elle repose en paix dans l’Amour qu’elle a partagé.